3 questions à Jean Dauriac, directeur d’un Institut de Formation en Soins infirmiers en Isère, où il donne des cours sur l’éthique de soins.
De quelles qualités spécifiques doivent se prévaloir les professionnels de santé qui s’occupent de personnes âgées ou handicapées ?
Le fait de choisir une profession de santé implique qu’on est prêt à s’occuper de gens malades de tous âges, souffrants ou mourants. Tout le monde n’en est pas capable, car cela réclame de l’altruisme. Cela nécessite que, durant son temps de travail, on soit pleinement à l’écoute de l’autre et qu’on s’oublie un peu soi-même. Plus les personnes sont vulnérables et fragiles, plus elles ont de difficultés pour s’exprimer, plus le soignant doit être attentif à l’écoute qu’il apporte à l’autre pour déceler les signes de souffrances et repérer les besoins non satisfaits.
Faut-il de la compassion ?
La compassion ne sert à rien. Le soignant ne doit pas être concerné par la souffrance de l’autre et pleurer avec lui, mais être concerné par la résolution de sa souffrance. L’affectivité, elle existe, mais en soi, elle ne résout rien. Ce n’est pas le rôle des professionnels de santé d’être affectueux . A une aide-soignante ou à une infirmière, on demande d’élaborer une prise en charge adaptée à chaque personne. Si en plus, elle est conviviale, chaleureuse, alors c’est très bien.
N’est-ce pas parfois démotivant de travailler auprès de personnes qui sont à la fin de leur vie ?
Pour un professionnel de santé, toute personne qui a besoin de soins y a droit. Quelle que soit sa condition ou son utilité sociale ! Nous ne sommes pas des objets : nous sommes des êtres humains. Notre société nous reconnaît le droit de bénéficier de soins et d’assistance jusqu’à notre mort, quelque soit notre état. Les soignants travaillent au service de cette idée humaniste. A partir du moment où ils ont conscience de cela, ils ne peuvent être que motivés, voire même narcissisés par leur métier. Ils n’ont pas besoin de la reconnaissance de l’extérieur. Souvent, ils ne se sentent pas reconnus parce qu’ils s’estiment mal payés. C’est autre chose. On peut réagir dans l’action sociale, le syndicalisme, mais cela ne doit pas faire douter de soi , de sa place dans la société et du besoin que la société a de soi ».
Propos recueillis par Odile Dor