Travailler dans le domaine de la gériatrie invite au questionnement anthropologique, affirme le psychiatre et psychanalyste Pierre-Marie Charazac *.

Pierre-Marie Charazac *, faut-il avoir la « vocation » pour travailler dans le domaine gériatrique ?

«  Pour s’occuper de patients âgés, il faut bien sûr des connaissances. On ne peut pas écouter convenablement un patient si on n’a pas un minimum de repères sur ses besoins spécifiques et les maladies qu’il peut développer. Cela dit, d’autres compétences, qui ne sont pas de l’ordre du savoir, sont essentielles ! 

Lesquelles ?

Le patient âgé nous questionne de manière particulière en tant que soignant. Beaucoup plus qu’un patient en dialyse ou en cancérologie. On n’aura peut-être jamais le cancer ni de problèmes rénaux. En revanche, on est sûr qu’on vieillira. Et nos parents avant nous. Le patient nous renvoie à notre condition humaine. C’est un questionnement anthropologique troublant qui apporte une dimension à la pratique du soignant.

Comment devient-on un bon professionnel en milieu gériatrique ?

Il y a des gens qui ont un génie personnel. Qui ont des intuitions très justes sur la bonne manière d’approcher l’autre, vulnérable. Cependant, la formation est essentielle. L’un des aspects de la formation porte d’ailleurs sur la connaissance de soi : un bon soignant est quelqu’un qui n’a pas peur de regarder en lui pour voir ce que la rencontre avec le patient déclenche. Il sait utiliser ses émotions pour être empathique, il les maîtrise. C’est une composante de base du métier de soignant, mais elle est particulièrement sollicitée en psychiatrie et en gériatrie.

Par ailleurs, plus on a bénéficié d’une formation approfondie sur les caractéristiques des patients dont on s’occupe, plus on a des mots appropriés pour parler d’eux lors de réunions d’équipe. Et ces échanges entre professionnels sont essentiels pour bien vivre ce métier ».

Véronique Châtel

* psychiatre, psychanalyste, responsable d’un département de géronto-psychiatrie au C.H Saint-Jean de Dieu de Lyon.