Françoise Bouillon décortique son travail d’auxiliaire de vie. Elle identifie des moments charnières où il se joue quelque chose d’important avec le bénéficiaire.
Bien souvent, nous utilisons alternativement les mots « autonomie » et « dépendance » sans bien repérer la différence entre les deux. C’est regrettable. Il est capital pour nous les auxiliaires de vie de faire la différence entre les deux termes et d’apprécier le degré de dépendance et/ou d’autonomie de la personne que l’on accompagne. La qualité de notre intervention, autrement dit la bonne réponse à ses besoins, en découlent.
Voilà pourquoi, en démarrant un accompagnement, il est utile de se poser ces deux questions fondamentales :
- La personne dispose-t-elle de toutes ses capacités à agir par elle-même, donc de choisir, de décider ? Si, la réponse est oui, dans ce cas, pas d’hésitation : la personne est autonome. Même si elle a par ailleurs besoin d’aide pour sortir à l’extérieur parce qu’elle manque d’équilibre et ou si elle se déplace en fauteuil. Être dépendant n’empêche pas l’autonomie.
- Ses capacités cognitives lui permettent-elles de prendre toutes les décisions qui seraient bien pour elle et ne l’exposeraient pas à des dangers ? Si la réponse est non, alors la personne n’est pas autonome, même si elle sait par ailleurs très bien cuisiner ou qu’elle parvient à se laver toute seule. L’indépendance dans la mobilité et les actes de la vie peut aller de pair avec une perte d’autonomie psychique.
Comment faire la part des choses en début d’un accompagnement ? En s’intéressant à la personne bénéficiaire et en l’interrogeant sur ses capacités. Ne pas lui demander si elle a envie de préparer elle-même sa soupe aux légumes, par exemple, ou de choisir elle-même ses vêtement, c’est supposer par avance qu’elle n’est plus capable de faire de choix ou de répondre à la question.
Par respect pour la personne que nous accompagnons, nous devons lui laisser le droit de se déterminer elle-même. C’est aussi la meilleure manière de l’aider à maintenir le plus longtemps possible, ses capacités.
Je suis intervenue pendant trois mois auprès d’un couple : le monsieur avait été victime d’un traumatisme crânien ; il ne pouvait plus marcher, ne parlait plus mais comprenait certaines choses. Sa femme, elle, était en grande difficulté psychique : elle paraissait en bonne santé physique, elle était active : elle conduisait, elle jardinait, mais n’arrivait plus à gérer ni les courses ni le budget de la maison. Elle achetait souvent, sans compter, rendant les fins de mois difficiles. Tout en laissant le frigidaire vide. Une collègue qui intervenait depuis plusieurs années chez eux en emploi direct, s’était laissée dépasser : la dame lui empruntait de l’argent. C’est le papa nonagénaire du monsieur qui a dû faire intervenir les services sociaux pour réorganiser l’aide à apporter à ce couple.
Notre travail commence par l’observation car chaque situation est singulière.