Le moment de la toilette est un moment intime que nous réalisons toute notre vie seul(e) et durant lequel nous n’aimons pas être dérangés.Que devient ce moment lorsqu’il s’agit de le partager avec une tierce personne ?
Une première question à poser régulièrement aux intervenants : « Accepteriez-vous d’être aidé pour votre toilette ? »En effet, certaines personnes âgées n’osent pas forcément exprimer leur malaise : elles manifestent le plus souvent un refus en prétextant qu’il fait trop froid pour se laver ou font croire que leur toilette a déjà été faite, que ça va bien pour aujourd’hui…La posture professionnelle doit intégrer un certain nombre d’éléments sur lesquels il faut toujours réinterroger sa pratique : « comment je mets à l’aise la personne pour aborder la toilette, qu’est-ce qui fait difficulté pour elle, comment je peux lever les obstacles, lui faciliter les choses, la personne peut-elle se sentir respectée au travers des gestes que j’effectue, est-ce que je lui laisse faire tout ce qu’elle est encore en capacité de faire elle-même …? » Les capacités relationnelles et de communication vont donc jouer un rôle important, en particulier si la personne se montre réticente, dans la manière dont les intervenants à domiciles vont « amener » ce moment de la toilette en évitant de prévenir à la dernière minute que c’est « l’heure de la toilette ».
Ex : « Il est 11h. C’est l’heure de la toilette, Madame Paul ». ou encore le plus souvent : « allez, on va faire la toilette »
C’est un moment délicat où la personne dévoile et « partage » avec les professionnels son intimité, sa nudité, son corps… Il est important de valoriser et de rappeler les bienfaits de la toilette : confort, bien être, sentir bon, prendre soin de la peau, la réhydrater…Lors des premières rencontres, il est indispensable de s’intéresser aux habitudes de la personne :
Ex : Vous lavez-vous le plus souvent au lavabo, à la douche, au bain ? Par quelle partie du corps commencez-vous ?,
L’aide à la toilette est un moment qui nécessite une grande vigilance, une écoute et de procéder par méthode, une organisation ainsi qu’une évaluation des capacités et de l’autonomie le jour de la réalisation : fatigue, douleurs, dépendance, envie, moral.
Afin de rester disponible pour la personne et de ne pas se trouver désorganisé, il est important de :
– prévoir le matériel (gants, serviettes propres, produits de toilette…), les vêtements qu’elle portera (en fonction de ses goûts, du climat, son confort…)
– sécuriser l’endroit, ou mettre une chaise si elle se sent fatiguée
– s’adapter aux situations, analyser les besoins et les priorités.
Ex : A-t-elle besoin d’aller aux WC avant d’aller à la salle de bains ?
Durant la toilette,
– échanger et expliquer les gestes avec elle tout en préservant la pudeur de la personne, c’est à dire en couvrant ses épaules, en maintenant la chaleur du corps, en rhabillant rapidement le buste de la personne dès qu’il est lavé.
– penser à fermer les volets, les rideaux sauf si la personne demande le contraire.
– observer l’état de la peau (ex : apparition de rougeur) et le signaler dans le cahier de transmission.
– faire participer la personne
Que faire lorsqu’un homme a une érection ?
Bon nombre de professionnelles sont souvent gênées d’avoir à aider un homme pour sa toilette.
Il faut toujours avoir en tête que le fait d’être touché provoque cette réaction physique réflexe.
Il n’y a, a priori, pas d’intention malsaine ; il s’agit donc de dédramatiser et d’y mettre un peu d’humour. L’homme est souvent lui-même gêné par cette situation.
Si l’homme est insistant, il s’agit alors de lui rappeler la fonction de l’aide à domicile, ce qui est acceptable, ce qui ne l’est pas, les limites et le respect mutuel.
Cela nécessite souvent un soutien de la part de l’équipe encadrante; ces situations, même si l’intervenante le gère bien sur le moment, sont déstabilisantes.
Que faire lorsque la personne a des troubles cognitifs ?
– lui montrer les gestes ou mimer le lavage du visage expliquant ce qu’elle doit faire.
– l’inviter à se laver en valorisant le plaisir et le confort qu’elle pourra en tirer et non le côté « hygiène »
– en profiter pour travailler la mémoire, les repères : chants, histoire de vie, nommer les parties du corps….
Pour l’habillage,
– encourager la personne.
Ex : Si la personne a essayé et n’a pas réussi à boutonner sa chemise, valoriser chaque effort fourni.
Une fois la toilette achevée,
– se renseigner sur son état : se sent-elle fatiguée, bien ?…
Enfin, pour avoir une vision la plus globale possible de la qualité du service rendu et pouvoir réajuster, croiser les regards et le vécu des différentes personnes impliquées : la personne âgée, les intervenants à domicile, l’aidant familial autour de questions toutes simples :
« l’heure à laquelle la toilette est proposée est –elle selon vous adaptée (question posée à l’aidant familial, à la professionnelle) et à la personne « l’heure à laquelle la toilette vous est proposée vous convient-elle ? »
Sur le même schéma :« la façon dont elle est elle est menée est –elle adaptée ? ».
Ce mode d’évaluation des situations concourt à requestionner encore et toujours la pratique professionnelle, celle des intervenants mais également celle de l’organisation de travail.
Patrice Leclerc, formateur chez BCCA